Interview avec l'artiste Audrey Baschet : " Le fait d'habiter sur le continent africain est très important pour moi "

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Installée à Marrakech depuis plus de 11 ans, Audrey Baschet en a vu du pays avant de définitivement poser ses valises dans la ville ocre. Considérée aujourd’hui comme l’artiste contemporaine qu’il faut absolument suivre, ses œuvres dégagent une puissance incroyable et son univers un peu dark ne laisse personne indifférent.

Son ascension fulgurante en l’espace d’une décennie et ses expositions à New York, Londres, Paris ou Marrakech en font une des artistes les plus en vogue du moment, avec notamment des expos en ce moment même à The Arx à Londres ou à la My Art Galerie à Marrakech, où on a eu le plaisir de contempler des créations impressionnantes, où l’émotion tient une place prépondérante.

On est parti à la rencontre d’une artiste bourrée de talent, guidée par sa passion, son amour pour l’Afrique, son besoin d’évasion et son imagination intarissable, Audrey Baschet.

Et comme disait Victor Hugo : En art point de frontière !

Interview avec Audrey Baschet :

Bonjour Audrey, où êtes vous née et où avez vous grandi ? 
 
Je suis née en province, en Sologne, une belle région forestière entre la Loire et le Cher, mais j’ai grandi à Paris. Ado, je me suis installée à Paris où je suis restée longtemps, après je suis allée en Normandie, j’ai habité sur la Cote d’Azur, avant de me retrouver à Marrakech. Ça fait plus de 11 ans que je suis à Marrakech.
 
« Jamais je n’aurais imaginé une seconde que je viendrai vivre un jour dans ce pays »
 
Et comment êtes vous arrivée à Marrakech ?
 
En fait, on a vendu notre maison dans le sud et on voulait quitter la France. On avait pensé à l’Italie, parce que c’est un pays que j’adore, et puis finalement, le frère de mon mari qui habitait ici nous a suggéré de venir tester et voir si ça nous plaisait. Et en fait ce qui est amusant, c’est que pour mon premier voyage toute seule, sans mes parents, j’étais parti au Maroc en moto avec une bande de potes, en 1980, ça ne me rajeunit pas (rires). Et c’est vrai que c’est amusant parce que jamais je n’aurais imaginé une seconde que je viendrai vivre un jour dans ce pays.
 
Après j’ai parcouru le monde, j’ai voyagé énormément mais le Maroc, ça a un sens particulier. J’ai eu un coup de cœur, c’était mon premier grand voyage où je sortais vraiment et en plus c’est un pays que j’adore. C’est d’une beauté extraordinaire ce pays. Et puis le fait d’habiter sur le continent africain, c’est très important pour moi. En fait, depuis des années, je vais beaucoup dans le sud de l’Afrique : Botswana, Afrique du Sud, Namibie… l’Afrique c’est mon continent, mon continent préféré. Donc le fait d’habiter en Afrique est vachement important pour moi.
 
« Mes décors sont inventés en fait. Je crée un décor »
 
Vous êtes donc artiste photographe ! Mais comment tout a commencé ?
 
Photographe je ne sais pas, j’ai commencé par de la photo classique, en fait non, au départ je peignais, j’ai fait beaucoup de peinture. Après oui, je prenais des photos de paysages, de tribus en Afrique justement, d’animaux sauvages, parce que c’était ma deuxième passion mais maintenant, c’est pas vraiment de la photographie parce qu’il y a un travail sur ordi, parce que mes décors sont inventés en fait. Je crée un décor.
 
En fait c’est comme une toile blanche chez un peintre. Quand j’ai besoin de matériaux, je vais prendre des photos de pierres, ça peut être de la pierre de Taza, des vieux murs éclatés, du bois…  Tout ça est stocké et après je me sers de ce dont j’ai besoin. J’ajoute mes éléments, j’intègre des petits personnages… Ça part d’une photo mais le résultat final est différent donc ce n’est pas vraiment de la photo. Ça vient de mon imaginaire, de ce que j’ai rêvé la nuit, ça peut venir de tout mais c’est plus mon imaginaire, une sorte d’intuition.
 
Avez vous eu un parcours académique ou vous êtes plutôt autodidacte ?
 
Je n’aime pas beaucoup ce mot, autodidacte, mais je n’ai pas fait d’école, je n’ai pas fait les beaux arts. J’ai toujours été passionnée par la peinture, j’ai été bercée toute ma vie par la peinture du 17ème, du 18ème. Après, j’ai découvert mes propres peintres, mes propres préférences mais j’ai pas fait de schéma classique. Mais c’est vrai que c’est une passion depuis que je suis enfant. Tous mes dimanches je les passais à dessiner, j’ai toujours aimé les dessins, la peinture… et après ça a dévié sur la photo quand j’ai grandi et que j’ai commencé a beaucoup voyager.
 
Est ce que vos parents étaient dans le monde de l’art ?
 
Ils avaient une société de construction de maison donc rien à voir avec l’art. Mais dans la famille, mon grand père peignait à l’époque, un très bon dessinateur aussi, il faisait ça pour le plaisir.
 
« Il y a toujours un truc, une histoire dans ma tête qui trotte »
 
D’où vous vient votre passion pour la photographie ?
 
C’est justement quand j’ai commencé à voyager. On a tous un appareil photo, tu es un touriste lambda, tu as ton appareil donc c’était forcément l’outil indispensable. Après, il y a des histoires quand tu prends une photo. Il faut que ça raconte quelque chose. Et donc après, je me suis fait mes propres histoires, c’est pour ça que je travaille mes fonds, il y a toujours un truc, une histoire dans ma tête qui trotte, et j’essaye de la mettre donc c’est pas vraiment de la photo. C’est pas une saisie de quelque chose. Pas toutes les photos bien sur. Il y a une de mes photos par exemple, qui a eu beaucoup de succès chez My Art Galerie où j’expose mes créations en ce moment : C’est une femme voilée, habillée d’un tissu un peu mauve, elle est juste sur une marche, un peu en hauteur… là c’est une belle photo mais tout a fait normale, il y pas vraiment beaucoup de travail mais d’autres sont très très travaillées, où il y a parfois plus de cent calques. 
 
 
Comme celle de l’homme avec le masque de gorille ?!!
 
Oui exactement. Celle-là par exemple, j’ai peint le mur, j’ai travaillé le décor, après j’ai pris la photo… Il a une histoire, il sortait de prison quand je l’ai pris en photo, il a une histoire particulière, une espèce de force.
 
 
Pourquoi cet intérêt pour cet effet un peu noir et blanc ?
 
En fait toutes mes photos sont en couleur, mais je désature les couleurs, j’aime bien les couleurs désaturées, ne me demandez pas pourquoi, je ne sais pas…(rires). Mais mon truc c’est le noir, je ne pourrai pas m’en passer, il y a tellement de noirs différents, c’est ma base le noir.
 
« Il a vu mes photos qui étaient posées dans un coin, il a dit : c’est qui, je veux l’exposer à New York »
 
Donc c’était une passion depuis votre plus jeune âge, mais à quel moment vous vous êtes dit que vous passiez au niveau supérieur et que vous étiez une artiste ?
 
J’aime pas dire que je suis artiste, je suis comme je suis. L’art c’est une passion depuis toujours, j’avais fait quelques petites expos en province et à Paris sans grand intérêt. Mais pour ma première vraie belle expo, je me suis retrouvée à New York, en fait c’était le hasard. J’ai un ami qui est peintre et dans son atelier, il a reçu la visite d’un mec qui regardait ses toiles, il a vu mes photos qui étaient posées dans un coin, il a dit c’est qui, je veux l’exposer à New York.
 
J’ai beaucoup de chance, j’ai beaucoup de bol dans la vie, il en faut (rires). Et je me suis retrouvée comme ça à exposer à New York, et là pour le coup c’était pour un travail en noir et blanc. Avant je travaillais en noir en blanc, essentiellement sur l’Afrique, les tribus, les animaux, les paysages… C’était en 2011, dans le quartier de Dumbo, à Brooklyn. C’est là où il y a toutes les galeries et j’y étais en plus pendant le festival international de la photographie donc j’ai eu une double expo, à la galerie et dans le cadre du festival. Après j’ai exposé à Paris dans de belles galeries, comme la NOT A Gallery de Natacha Dassault.
 
« Ils m’avaient demandé cinq photos au départ, ils ont regardé mon Insta et du coup ils m’ont demandé toutes mes photos »
 
Et actuellement il y a Londres, dans l’une des plus belles galeries, Arx. Ils m’avaient demandé cinq photos au départ, et je viens d’ouvrir un compte Instagram juste pour mes photos, donc en fait ils ont regardé mon compte et du coup ils m’ont demandé toutes mes photos. Ce qui devait au départ être une expo collective avec cinq photos, s’est transformé en expo perso, et ils me laissent tout le premier étage. J’ai sélectionné quand même mais il y a beaucoup de mes photos, ça c’est vraiment top. Parce que c’est vraiment LA galerie de Londres, ils ont ouvert il y un an, ils ont démarré fort, ils exposent du Basquiat, du Warhol, des photographes connus comme Nick Brandt. Peut être que je vais exposer en Belgique aussi, il y a de très belles galeries à Bruxelles, c’est une place incontournable de l’art. L’idéal ce serait Bruxelles, Berlin ou Amsterdam mais mon expo actuelle à Londres va me faire beaucoup de bien.
 
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
 
Tout peut être inspirant, mais si vous faites référence à des gens connus dans la peinture, j’adore Soulages, et Fautrier qui est mon peintre préféré, qui est je pense le seul à avoir une petite influence sur ce que je fais. Fautrier je l’adore.
 
« Le matin c’est juste incroyable, il y a des girafes qui passent juste à côté de toi »
 
Quels sont les endroits où vous aimez le plus travailler ?
 
C’est difficile à dire, je prends des photos bien sûr, mais la composition se fait dans mon bureau, avec mon ordi, ma palette graphique, en tout cas pour ce que je fais maintenant. Avant, mon bonheur, c’était effectivement, de partir dans le sud de l’Afrique, en Namibie, où j’ai un 4×4 chez des amis. Je pars et je campe, je trouve un endroit superbe et je plante ma tante, et le matin c’est juste incroyable, il y a des girafes qui passent juste à côté de toi.
 
Ça fait maintenant cinq ans que je ne suis pas parti là-bas, alors que j’y allais tous les ans. Ça, ça me manque énormément, en plus avec les problèmes de Covid… Et ça c’est mon kiff, de camper et d’être en brousse, d’être seule, et quand j’en ai marre je repars. Je peux rester trois jours à un endroit, une journée ou une semaine. Je suis un peu sauvage, à la maison par exemple, je vis avec mes chats, j’en ai trente, mais je commence à être débordée (rires).
 
« Une fois j’ai été chargée par un éléphant, c’était la plus grosse frayeur de ma vie mais c’était de ma faute »
 
Avez vous connu des mésaventures ?
 
Oui, parfois j’ai frôlé la mort. Une fois j’ai été chargée par un éléphant, c’était la plus grosse frayeur de ma vie mais c’était de ma faute, de toutes les façons c’est toujours de notre faute. L’animal qui me fait le plus peur c’est l’éléphant, ce sont des êtres extrêmement intelligents, magnifiques, une société matriarcale…le rêve (rires). Et la je suivais un troupeau qui remontait de la Namibie au Botswana, et en fait il y a des barrières partout et les différents pays qui ont des frontières communes ont signé des accords pour que les animaux puissent passer librement.
 
Les éléphants se déplacent sur des centaines de kilomètres, d’un pays à un autre donc il y a des passages, des ouvertures… et j’ai suivi le troupeau d’éléphants jusqu’au Botswana. Et un soir, mais c’est vraiment de ma faute, je repère un endroit magnifique sous un arbre où je voulais camper, mais il y avait un éléphant, un vieux mal, en général il ne faut pas les déranger, Ils vivent seuls parce que lorsqu’ils sont trop vieux, ils s’écartent du troupeau pour aller mourir !
 
Il était donc en dessous de l’arbre, exactement où je voulais camper. Mais un animal sauvage est un animal sauvage et là, j’ai eu un réflexe de débile, je le sais (rires). J’ai voulu le faire bouger, donc je lui ai jeté des fruits de l’arbre en espérant le faire partir, j’étais fatiguée, je voulais juste me reposer donc j’ai insisté, jusqu’au moment où il m’a chargé. Heureusement il y avait un ami avec moi dans la voiture, donc il a démarré à toute vitesse et je me suis jeté sur la voiture, je me suis accrochée à la porte et on s’est enfui. Je m’en souviendrai toute ma vie. Des histoires comme ça, il y en a des centaines.
 
Un jour je suis tombée en panne en plein désert du Kalahari, qui passe par le Botswana, la Namibie et l’Afrique du Sud. J’y étais pour voir une variété de lion à la crinière noire, qui est endémique au Kalahari. Et pendant que j’étais à leur recherche, je suis tombée en panne et je suis restée bloquée pendant une semaine, avec tous les dangers que ça représente, les animaux et surtout les fauves qui sortent la nuit. Je dormais dans la voiture, sans bouger. Le matin, je trouvais des traces et des empreintes autour de la voiture et c’était les fameux lions pour lesquels j’étais venue.
 
C’était très risqué de sortir avec tous ces animaux qui rôdaient autour de moi, il y avait déjà eu quelques graves accidents, en plus je n’avais plus d’eau, plus de vivres… Heureusement, un ranger est finalement venu, on a réparé le 4×4 et j’ai suivi les fameuses empreintes. Après plusieurs heures je suis tombée sur les lions, il y avait trois magnifiques mâles à la crinière noire. Pendant une semaine j’ai un peu flippé mais finalement j’ai été récompensée. Donc ça pour moi c’est le plus grand des kiffs, c’est la chose qui me fait vibrer. Et là évidemment, tu vis le moment et après, tu prends ton appareil.
 
« La tribu des Himbas, une tribu sublime qui vit au nord de la Namibie. Les mecs font tous deux mètres, ils sont d’une beauté incroyable »
 
Il y a aussi des tribus comme la tribu des Himbas, une tribu sublime qui vit au nord de la Namibie. Les mecs font tous deux mètres, ils sont d’une beauté incroyable. Les femmes sont nues, elles ont juste une petite jupette en peau de chèvre et des bijoux partout. Leur particularité c’est qu’elles mélangent le beurre et la terre ocre, elles en font une crème avec laquelle elles se badigeonnent entièrement le corps, ça leur donne un aspect un peu rouge magnifique.
 
« Heureusement, j’arrive encore à trouver sur cette planète, des endroits où pendant trois semaines, je ne vais pas voir un seul être humain »
 
Mon plus grand bonheur c’est être là-bas, seule ou accompagnée. Je fuis les endroits où il y a trop de touristes, je ne suis jamais allée au Kenya ou en Tanzanie mais heureusement, j’arrive encore à trouver sur cette planète, des endroits où pendant trois semaines, je ne vais pas voir un seul être humain. C’est ça mon kiff, prendre des photos de tribus ou d’animaux que j’ai croisé, c’est mon bonheur le plus absolu.
 
Comment définiriez-vous votre style  ?
 
Epuré. Mes photos sont épurées. Je suis amoureuse de l’esthétique. Il y a des photos merveilleuses par exemple d’un vieil homme ridé, ça peut être très beau tu vois, mais je ne prendrai pas ce genre de photo. L’esthétisme est vachement important pour moi, le physique est très important aussi, comme la photo du type qui sortait de prison. Les corps sont vachement importants, les muscles, le physique chez les femmes…
 
C’est vrai aussi que je ne prends pas de modèles, jamais je n’ai payé quelqu’un pour poser, non. Ce sont des connaissances, des amis, comme par exemple la photo de la femme habillée tout en blanc, elle est dans un rideau blanc, je l’appelle ma mariée entre guillemets, mais elle n’a pas de robes donc elle a mis un rideau. Elle est nigérienne, c’est une amie, elle est très belle physiquement, elle a un visage magnifique. L’esthétique chez les humains est importante pour mes photos (rires).
 
 
Là j’ai fait une photo dans ma nouvelle série, mon modèle c’est ma belle fille qui est très belle.
 
 
Donc voilà, j’aime bien les choses très épurées, aller à l’essentiel. Il y a pas de décor en fait, mon décor c’est un mur délabré ou une vielle pierre et puis, il y a la partie esthétique que j’intègre. Un vieux mur peut être super esthétique. On est débarrassé de tous les détails, comme c’est super épuré, il y a un personnage et tu rentres vraiment en connexion avec lui.
 
« Je suis hyper privilégiée, ça a son importance. Parce que si j’avais besoin de ça pour vivre, là je ferai plus d’efforts bien sûr »
 
Qu’est-ce-qui vous motive à créer ?
 
La motivation je ne la connais pas, c’est plus fort que moi, c’est un besoin, c’est comme manger ou boire. Je ne fais pas ça pour laisser une trace, j’ai pas de problème d’ego ou de reconnaissance, je m’en fous complètement. Par exemple pour mon expo à New York, le mec m’avait dit qu’il aimait beaucoup mon travail et qu’il voulait m’exposer dans sa galerie, on a échangé nos numéros mais bon, je ne l’ai jamais rappelé. Et un jour il m’a appelé et m’a demandé si ça avançait pour l’expo car c’était pour bientôt, et là j’ai compris que c’était sérieux. Donc je ne pense pas à ça, mais attention, je suis hyper privilégiée, ça a son importance. Parce que si j’avais besoin de ça pour vivre, là je ferai plus d’efforts bien sûr.
 
Je vis dans un endroit magnifique, je n’ai pas de problème d’argent, mais j’ai d’autres problèmes hein (rires). J’ai beaucoup de chance et j’en suis consciente, je peux me consacrer à ma passion et ne pas me soucier d’autre chose, mais je ne vais pas nier que ça me fait plaisir que les gens apprécient mon travail. À New York pour ma première expo, il y avait des gens qui faisaient la queue pour me poser des questions, je n’avais pas du tout l’habitude mais j’ai trouvé ça génial. Le fait d’être connue, je m’en fous, mais le fait qu’il y ai des contacts avec les gens, des échanges, ça j’aime. C’est pour ça que je suis super contente pour mon expo à Londres.
 
« Je vois la création finale dans ma tête et quand je travaille, j’aboutis à quelque chose de totalement différent, c’est systématique »
 
Quel est votre processus créatif ?
 
Le truc, c’est que j’ai plein d’idées tout le temps, j’en ai dix milles dans la tête, et je me dis par exemple aujourd’hui je vais faire ce que j’ai vu. Donc il me faut tel élément, telle personne, je vais mettre des éléments petit à petit et à chaque fois, je vais à l’encontre de ce j’avais imaginé au début. Je vois la création finale dans ma tête et quand je travaille, j’aboutis à quelque chose de totalement différent, c’est systématique.
 
En fait c’est vraiment quand je travaille sur mon ordi. Je peux travailler cinq heures sur un truc et d’un seul coup j’enlève tout et je repars dans une direction qui est totalement opposée à ce que j’avais imaginé. En fait, pendant que je travaille, j’ai d’autres idées qui me viennent et donc ça peut parfois prendre plus de temps, et en général, c’est la dernière idée qui l’emporte.
 
 
Et puis j’aime la tranquillité, le silence est super important pour moi. La maison est grande, j’ai mon bureau, je suis isolée, c’est parfait. Mais avant, quand j’ai commencé à faire de la photo, je n’avais pas tout cet espace et avec les enfants, pas possible de m’isoler donc c’était surtout la nuit que je travaillais. J’aime beaucoup la musique mais jamais quand je travaille. Il faut que je sois seule avec moi-même.
 
Quelle œuvre vous représente le mieux ?
 
En fait c’est très bête, mais c’est toujours la dernière photo, c’est toujours celle que je fais en dernier que j’adore. Donc en fait, ce sera la prochaine. Je ne peux pas répondre autre chose, c’est la dernière création que je fais.
 
Quels buts recherchez vous lorsque vous exposez vos œuvres ?
 
Aucun. Comme je disais tout à l’heure, c’est un peu compliqué car je n’ai jamais cherché à exposer. Honnêtement, il y a des gens qui font des photos pour passer des messages, sur l’écologie ou sur la société, moi je n’ai pas du tout de message à faire passer. La seule chose qui m’importe, c’est que quand quelqu’un regarde une de mes photos, il se passe quelque chose, qu’il y ai une connexion, un ressenti. Il n’y a que ça qui m’intéresse. C’est très égoïste ce que je vais dire mais je le fais pour moi, parce que c’est ma passion.  Après, chacun a un ressenti, chacun va voir sa propre histoire en regardant. Ce qui me rend heureuse c’est l’interactivité avec la personne qui regarde ma photo, c’est la seule chose qui compte.
 
« Dark, épuré et esthétique »
 
Trois mots qui décrivent votre travail ?
 
Dark, un côté dark, que je pense j’ai en moi. J’ai un côté sombre depuis toujours, de par ma vie, de par mon vécu, de par ma famille. Épuré comme je disais tout à l’heure et esthétique. Donc dark, épuré et esthétique. 
 
Que diriez-vous à l’Audrey d’il y a dix ou quinze ans ?
 
Ne change rien (rires). Ne te pose pas de questions. Profite.
Si je devais refaire le même parcours, YALLAH.
 
Que peut-on vous souhaiter pour continuer à créer ?
 
Déjà, que je ne devienne pas aveugle (rires). Mais honnêtement, comme c’est une véritable passion, je pense que je n’arrêterai jamais.
 
Un dernier mot qui définisse votre philosophie ?
 
La liberté, personne n’est vraiment libre mais bon. J’ai toujours été très libre, j’ai toujours fait ce que je voulais, quand je le voulais. Même quand mes enfants étaient bébés, je partais en Inde, je revenais, mais j’ai toujours eu cette envie, ce besoin d’évasion, même lorsque j’étais toute petite. J’ai ce besoin de partir, de me retrouver avec moi même… donc, la liberté.
 
Merci Audrey pour cet agréable moment et à très bientôt.
 
s